La solitude, ce mauvais compagnon

depuis le début de la Pandémie, je regarde peu les infos mais je ne peux m'empêcher de tomber sur ces reportages où les personnes agées sont enfermées dans leurs chambres d'hopital ou de maison de retraite, le regard vide.. seuls ! Cette solitude qui a franchi le seuil de ma mère le 6 aout 2018 quand mon père s'en est allé... Aujourd'hui, elle grignote un peu plus de ce précieux lien qui nous lient....

Il y a bien évidement le "Vaut mieux être seul que mal accompagné" que l'on entend à tout bout de champs lors d'une séparation amoureuse.. et puis il y a la réalité.. la solitude que la vieillesse impose. Comme si c'était une option obligatoire lorsque l'on prend de l'âge. 

Ma mère n'a que 77 ans cette année et elle est seule et surtout malheureuse. Pourquoi j'ai l'impression que ce n'est pas sa tumeur au cerveau, son nodule au poumon ni même son fémur cassé qui la poussera sur la pente, mais bien cette impression de solitude qui, évidement est bien là, mais pas tant que ça. 

La solitude est aussi un état d'esprit. Mais comment l'apprivoiser à 77 ans quand durant plus de 55 ans la compagnie était quelque chose qui se vivait au quotidien, comme attaché l'un à l'autre, comme un autre membre de son propre corps, la solitude, c'est cette amputation pour elle. 

L'arrivée d'un chaton dans son existence cet été a comblé un vide. Après avoir pris soin durant tant d'année de mon père, c'est Poussinette qui est devenu le centre de son attention à la maison. C'était pour moi un défi, lui faire remonter la pente.. et nous y étions arrivés. Tous les jours n'étaient pas roses mais ça allait à peu près et puis il y a eu cette chute, cette fracture et aujourd'hui cette maison de convalescence qui l'enterre. le terme est trop fort? Pourtant c'est bien ce que je perçois, une glissade inexorable, un laissé aller. Et je me prépare.. prépare comme je me suis préparée des années auparavant pour mon père.

Bientôt elle en sortira, au plus une 15 aine de jours.... mais là, sa solitude qui finalement sera la même en pire (puisque toute la journée entre kiné, infirmier, aide soignants et autre docs, elle avait toujours de la visite) mais à domicile deviendra mon calvaire. Je suis consciente que tout ce que j'écris est d'un grand égoïsme. La fatigue et la lassitude me guettent. Mais je suis debout. Comment? ne me demandez pas... je me demande par contre quand je vais m'effondrer !

On me dit autour de moi "Prends soin de toi, préserve toi"...C'est ce que j'essaye de faire quand la nuit pour éviter des réveils en sursauts, je coupe mon téléphone, quand j'essaye de pas la rappeler quand m'ayant appelé pour me parler, elle me raccroche au nez car elle n'aime pas ce que je lui dit. Oui, je devrais lui parler autrement, oui ce n'est plus la même.. mais pourquoi ai je cette impression qu'elle joue de tout ça ? Lui passer sa jalousie? Sa culpabilisation, ses mensonges et se jérémiades ? je n'y arrive pas. Deuxième couche de culpabilité !

Alors qu'elle emmerderait la terre entière, j'essaye de faire le moins de vagues possibles...

J'ai cette peur de lasser l'autre, les autres avec mes histoires de mère malade. Alors quand on me demande "Ça va?"... parfois je réponds comme ma mère a toujours répondu "On fait aller." C'est certain, ce n'est pas le Pérou... ça pourrait être plus fun. De toutes façons tout le monde en ce moment vit une vie de merde.. ma merde à moi est un peu plus grosse.

J'ai cette impression de m'être résignée... c'est dur.. mais il faut que ça passe ! Je fais ce que je peux pour que ça passe le moins difficilement possible mais tous les jours je ressens ce glissement inéluctable.


Photo prise sur le net - Ismael Nieto

Commentaires

Gine a dit…
Cet article fait écho à mes propres pensées. Ma mère a 20 ans de plus que la tienne, mais elle se bat encore et oscille entre perte de mémoire et flamboyance des sentiments. Beaucoup de révolte et de tristesse... une vie sans cette joie qu'il est difficile de ranimer! Et notre impuissance...
barbara a dit…
Oui, tu l'a dit, impuissance, cette impression que leur vie leur échape et qu'elle file ne plus entre nos doigts qui voudraient les retenir.Pour ma part, je pense que ma mère ne livre plus aucune bataille. je pense qu'elle est dans l'expectative. Et je crois que malheureusement moi aussi.
Merci et courage encore une fois

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