Le cafard du soir du 25 décembre

 Le cafard du soir du 25 décembre







Ce soir j’ai 5 ans, et c’est Noël... mais la fin.
Parce que lorsque l’on est enfant Noël dure presque 1mois. Ca commence le 1er décembre et ça fini le 25.
Dès le 1er décembre, je sens mon cœur s’emballer, s’émouvoir de tout... les publicités pour les jouets envahissent les écrans, des rouleaux de papier apparaissent et disparaissent dans la maison. Ca s’agite, ça fait des messes basses et quand je m’approche, les grandes personnes se taisent. Je sens bien que tout est différent, je sais que ça a un rapport avec Noël. Je découpe les catalogues et fais de collages en guise de liste pour le Père Noël. A partir de maintenant  je dois être encore plus sage, mais c’est difficile de tenir en place et de se raisonner quand tout autour contribue à m’émerveiller : les lumières, les vitrines, la musique... et plus on s’approche du jour j et plus la pression monte, encore 7 dodos, 6 dodo, 5 dodos... les lentilles qui poussent depuis le 4 ont tendance à courber la tête, la crèche et le sapin seront fait le 24 apres midi. Tout un rituel familiale. .. 4, 3, 2 dodos... 1 dodo et c’est déjà demain. J'aime regarder les santons, ce sont ceux de ma même, ils n’ont pas d’âge, le vieux miroir en guise de lac et son petit pont de carton, la farine qui fait office de neige, la grotte soigneusement fabriquée avec le papier crèche abrite la sainte famille ....les rois mage se cachent derrière le sapin, ils avanceront un peu tous les jours jusqu'à l’Epiphanie...même s’ils ont hâte d’arriver, comme moi.
Cette nuit c’est sa nuit, la nuit du Père Noël,  la nuit magique où le vieux bonhomme et son traîneau tiré par les rennes, va traverser le monde à la vitesse de la lumière, pour déposer les cadeaux aux enfants sages, dont je fais partie. Le repas me semble une éternité ”c'est quand que l’on va se  coucher ?” parce que l’on me répète à longueur de soirée qu’il ne passera qu’une fois que je serai endormie. Pourtant je veux  veiller car j’aimerais tellement le surprendre, l’épier avec son traîneau sur le toit ou devant la maison. Je n’ai pas de cheminée mais c’est pas grave, on me dit qu’il peut passer par la fenêtre,  même si elle est fermée. Je colle mon nez à la vitre des fois que je le verrai passer. D’ailleurs il me semble l’apercevoir furtivement au loin. N’est ce pas le nez de Rodolphe que je vois briller pres du fort du Mont Alban ? On me confirme que c’est bien lui. Je suis au comble de la joie.... il rode autour, il viendra, c’est sûr! J’ai préparé le verre de lait et le biscuit. Ils en aura bien besoin pour tenir toute la nuit.
J’ai les yeux qui piquent, je tombe de sommeil. Je m’écroule sur le canapé, le repas interminable de mémé Lina, à eu raison de moi! Les couleurs scintillantes des guirlandes lumineuses du sapin sont les dernières choses que je vois avant de sombrer dans les bras de Morphé. Il n’est pas minuit. Je me réveille en sursaut, il y a du bruit dans le salon. C’est lui, j’en suis sûre ! J’enfonce m'a tête sous la couverture, je plonge plus loin et je touche du pied la bouteille de limonade pleine d’eau bouillante, emmaillottée dans des chiffons qui me sert de bouillotte. Je suis partagée entre l’envie d’aller voir et la peur de me retrouver fasse à lui.... il pourrait décider de partir et de ne pas déposer les cadeaux... alors je sers plus fort mes paupières, surtout ne pas aller voir, se rendormir jusqu'à demain matin.
Enfin!
Il fait jour,  j’ouvre les yeux et je saute de mon lit, je cours au pied du sapin. La magie de Noël.... une multitude de cadeaux. Je réveille tout le monde ”le père Noël est passé, le père Noël est passé” et je crois que c’est le plus beau moment de l’année, celui que j’ai attendu 365 jours. C’est la joie dans la maison, c’est la fête, les papiers volent, les cris fusent, les rires éclatent! Je déballe et  découvre toutes les merveilles que j’ai commandées et même celles que je n’avais pas commandées. Décidément il est magique le papa Noël, il sait ! Je vais passer ma journée à jouer tandis que les grands vont se remettre à table pour un nouveau repas gargantuesque. La journée touche à sa fin. Il est 16h30 et la lumière décline, puis l'obscurité s’invite et c’est la nuit. Il est 18h. Soudain je réalise que c’est fini.... je suis la petite marchande d’allumettes qui vient de gratter sa dernière allumette et qui regarde s’éteindre la dernière flamme et avec elle la magie enveloppante de Noël. Une grande mélancolie m’envahit. Je me blotti contre mon père et je pleure ”pourquoi tu pleures bichette?” entre deux sanglots je lâche ” parce que Noël c’est fini....”

Nous sommes le 25 décembre, il est 19h30 et aujourd'hui j’ai 47 ans de plus. Mais pourtant, cette tristesse infinie qui me submergeait petite, est toujours là. Parce que Noël c’est fini.
La magie va disparaître.
J’ai tellement la nostalgie de ces moments où tout le monde était encore là,  mes grands parents et puis mes parents.
Petite j'étais émerveillée par les cadeaux que je recevais, aujourd ce qui me rend le plus heureuse c’est de voir ceux que j’aime déballer les leurs.... les miens.

Le feu de la dernière petite allumette tremble, dans quelques heures la lumière va s’eteindre, emportant avec elle la magie des souvenirs joyeux, de l’insouciance, de l’enfance parce que finalement c’est peut être tout simplement ça la féerie : croire que tout est possible, facile et que le bonheur est notre faculté à rêver et rêver encore que ceux que l'on aime seront toujours à nos côtés, même après leur départ....

Que vive encore longtemps notre âme d’enfant....

Commentaires

Françoise a dit…
Un texte joliment écrit et émouvant.
Merci de ce partage, Barbara.
Oui, que vive encore longtemps notre âme d'enfant.
Je t'embrasse fort.

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